Amanda Verbeck & Tanyaradzwa Sahanga les 2 entités à la tête du programme Futurecraft d’adidas nous livre les difficultés qu’ils ont rencontré pour être en place la deuxièmes phase de cette magnifique aventure.
Loin. Prenez un instant pour penser à ce mot. C’est quelque chose dont on parle tout le temps. Partir loin. Être loin. Éloigner. Comme si ce « loin » était un pays merveilleux et légendaire capable de tout changer. De faire en sorte que tout se passe bien. Mais en réalité, « loin » signifie simplement ailleurs. Dans un autre endroit.
En ce qui concerne les déchets plastiques, se contenter de les déplacer ailleurs représente justement le problème, pas la solution. Chez adidas, nous voulions trouver une solution et c’est pourquoi nous nous sommes lancés dans l’aventure FUTURECRAFT.LOOP, notre quête pour développer un produit circulaire.
Ce défi est impressionnant, mais nous le relevons volontiers. Après près de dix ans de développement, les premiers fruits de notre labeur ont vu le jour cette année, en avril, avec le lancement de FUTURECRAFT.LOOP, notre première chaussure de running dédiée à la performance et recyclable à 100 %. Alors que nous sommes sur le point d’entamer le chapitre suivant de cette histoire, nous voulions partager avec vous quelques moments forts, certains positifs, d’autres moins, qui ont marqué ce projet. Nous ne sommes pas les premières à le dire : la route menant au succès est souvent pavée d’échecs.
Commençons par le commencement. Seulement 9 % des déchets plastiques ont déjà été recyclés. C’est un fait. Qu’arrive-t-il à votre chaussure une fois que vous l’avez trop portée ? Vous la jetez, l’envoyez au loin. Sauf qu’il n’y a pas d’ailleurs. Ce pays merveilleux dont nous parlions plus tôt n’existe pas. C’est pourquoi nous nous trouvons confrontés à une grave menace environnementale représentée par les plastiques qui encombrent toujours plus nos décharges et nos océans.
Imaginez maintenant un produit à la durée de vie illimitée. Un produit dont la matière première n’est jamais jetée, simplement transformée en un autre produit. Puis un autre. Et encore un autre. Un produit fait pour être refait. C’est l’aventure dans laquelle nous nous sommes lancés. Après le lancement du produit en avril, nous avons enchaîné sur la Phase 2 : nous avons récupéré les premières chaussures FUTURECRAFT.LOOP et les avons recyclées pour créer les composants d’une toute nouvelle chaussure. Il s’agit d’une étape majeure sur la voie qui nous mènera à un produit circulaire.
Repousser les limites
Comment en sommes-nous arrivés là ? Il s’agissait de quelque chose que nous n’avions jamais réalisé auparavant, nous étions donc face à une feuille blanche. Nous avons une formation d’ingénieurs et nous développont des produits pour adidas Running. Nous travaillons donc main dans la main avec l’équipe de R&D, qui est à l’origine de nos idées. Nous collaborons également étroitement avec notre équipe de designers afin de déterminer ce à quoi le produit de demain pourrait ressembler.
La première chose que nous avons constatée était que la description de nos postes n’était pas adaptée. Nous étions confrontés à des défis complètement originaux. Nous ne pouvions pas avancer en continuant de travailler chacun de notre côté et en ne nous réunissant qu’une fois de temps en temps. Il s’agissait d’une question de mentalité. De limites à repousser. Nous avions un rôle d’explorateurs et de pionniers. Il nous fallait essayer quelque chose de nouveau.Pour ce genre de projets, il faut avoir l’approche suivante : nous allons apprendre des choses et nous allons les appliquer dans un cadre où l’objectif est d’en faire une réalité commerciale.
Notre travail de développement a culminé plus tôt cette année, quand le produit est sorti du laboratoire et que nous l’avons remis entre les mains de consommateurs. Dans le cadre du lancement, en avril, nous avons ainsi distribué 200 paires de FUTURECRAFT.LOOP à des créateurs adidas : nos athlètes, des musiciens, des artistes et une sélection de médias partenaires à Londres, Paris, New York, Los Angeles, Shanghai et Tokyo, ainsi qu’à une sélection d’employés adidasparticipant à un programme interne. Leurs instructions étaient : voilà les chaussures, allez-y, utilisez-les comme bon vous semble, puis rendez-les-nous. C’est cela, rendez-les-nous. Comme vous vous en doutez peut-être, c’est ce dernier point qui s’est révélé le plus problématique et de nombreuses personnes ne nous les ont pas rendues ou ont mis du temps à le faire. Cela s’est avéré être une leçon précieuse, mais elle nous a d’abord retardés. En effet, chaque matériau compte et il nous fallait en obtenir une quantité déterminée pour nourrir la machine une fois celle-ci allumée.
Quand nous avons commencé de récupérer les chaussures, le projet est soudain devenu très concret. Et quand nos employés, qui ont été les premiers à nous rendre les chaussures, nous ont fait part de leur avis et de leur enthousiasme, nous avons eu notre premier moment d’émerveillement. C’est à cet instant que nous avons commencé de comprendre ce que les créateurs puis les consommateurs pourraient ressentir face à ce changement de mentalité. Au cœur de notre projet se trouve en effet cette question : les gens sont-ils prêts à abandonner une norme culturelle associée à leur manière d’acheter et d’utiliser des produits ? Vont-ils vraiment nous rendre les chaussures ? Nous savons qu’il ne sera pas facile d’expliquer cette logique circulaire aux consommateurs et nous souhaitons ainsi que nos collègues et nos Créateurs nous accompagnent dans cette aventure pour observer leur comportement et comprendre ce qui leur semble important, afin de pouvoir en tirer des leçons.
La question à laquelle nous cherchons à répondre est d’ampleur mondiale, elle dépasse la simple échelle d’adidas : comment gérer un produit en fin de vie ? C’est quelque chose qui n’a jamais été accompli auparavant et notre approche tout entière est un test bêta, ce qui rend notre aventure d’autant plus fascinante. Nous sommes ingénieurs, mais en réalité notre travail consiste à trouver des solutions. Le problème auquel nous faisons face aujourd’hui concerne l’ensemble de l’industrie et il est crucial de lui apporter une réponse. Nous avons beaucoup de respect pour notre planète et la nature, et nous restons convaincues que l’humain possède la capacité d’innover et de trouver des solutions.
Utiliser les chaussures usagées
Imaginez la scène : devant vous se trouvent 200 paires de chaussures formant un énorme tas. Il s’agissait à l’origine de chaussures de running blanches, mais elles sont maintenant d’une couleur complètement différente, vertes ou roses en fonction de l’environnement avec lequel elles ont été en contact, ou couvertes de gribouillis quand elles ont été personnalisées. Assister au nettoyage de ces chaussures provenant du monde entier a été impressionnant. Encore une fois, l’ampleur de la tâche m’a frappée : imaginez une immense laverie pleine de machines de nettoyage industrielles et cinq ou six bennes métalliques remplies à ras bords de chaussures.
Dès que nous avons reçu les chaussures de Gen 1, nous avons pu commencer la Phase 2. Nous avons collecté les chaussures, les avons recyclées, intégrées dans notre chaîne d’approvisionnement pour finalement transformer le matériau recyclé en nouveaux composants. Le matériau est fondu et façonné en nouvelles billes, qui sont alors chauffées afin d’être modelées en nouveaux composants, comme des œillets et des semelles extérieures. Les composants restants, la semelle intermédiaire et la tige, sont créés à partir de TPU vierge. Les composants recréés et les composants neufs sont alors thermos soudés afin d’aboutir à la Génération 2 : une chaussure de running bleue, composée d’un matériau unique et toujours recyclable à 100 % qui servira à créer la prochaine génération. Voilà où nous en sommes aujourd’hui : sur le point de lancer la prochaine génération de FUTURECRAFT.LOOP et de faire un pas de plus vers la réalité pour le consommateur. Le tout en l’espace de seulement huit mois. Une grande première pour adidas.
Accepter l’inconfort
Quand nous pensons à tout le chemin que nous avons parcouru, nous en tirons la conclusion que la meilleure approche consiste à être préparé à l’inattendu et à tout ce qui peut se présenter. Nous n’avons jamais perdu notre objectif de vue et, tous ensemble, nous nous sommes efforcés de faire face et de surmonter chaque défi.
Il est nécessaire d’apprendre à être à l’aise avec l’inconfort. Ce n’est pas donné à tout le monde. Cela signifie apprendre à être à l’aise avec la vulnérabilité, avec le fait de « ne pas savoir ». Ce n’est pas chose facile, car si c’était le cas, notre solution existerait déjà. Nous sommes cependant convaincus d’être sur la bonne voie. Nous avons peut-être rencontré quelques écueils, mais nous savons où nous allons.
À partir de quel moment pourrons-nous dire que nous avons enfin trouvé une solution à la fin de vie des produits ? Nous en sommes encore loin, mais nous avons fait d’immenses progrès dans cette direction. Des progrès qui, espérons-le, sauront inspirer de futures solutions encore plus adaptées. Nous faisons office de catalyseur sur cette question, mais cela ne suffit pas. Afin d’avoir une idée de ce que peut véritablement représenter une redéfinition de la fin de vie d’un produit, nous devons regarder au-delà d’adidas, considérer la planète entière et la direction qu’elle prend, et partager nos découvertes avec le reste de notre industrie.
En tant que représentants d’adidas, nous pouvons légitimement nous poser la question, mais nous ne pouvons pas trouver la réponse seuls. Celle-ci se trouve dans l’ensemble de la chaîne de valeur, en commençant par le consommateur. Infinite Play représente un pas dans cette direction. Ce nouveau service, lancé au Royaume-Uni, permet d’échanger son vieil équipement adidas afin qu’il ne soit pas simplement jeté. Une leçon importante que nous avons apprise par le biais de notre programme bêta est que nous devons faciliter la démarche de retour des produits proposée aux consommateurs et leur donner une idée de la valeur potentielle et intrinsèque d’un produit usagé et des matériaux qui le composent. Nous allons continuer de tirer des enseignements de cette expérience en prévision de la sortie commerciale de FUTURECRAFT.LOOP, au Printemps-été 2021. Pour aller au bout de cette aventure, nous aurons besoin d’avoir les consommateurs à nos côtés.
La question des déchets est à l’origine d’une montagne de défis. Nous sommes convaincus que la bonne manière d’attaquer ce problème consiste à développer un produit entièrement recyclable. Pour la première fois, nous allons donc lancer un produit refait à partir de matériau issu d’un autre produit. Nous avons pris une chaussure, l’avons broyée et l’avons injectée dans une nouvelle chaussure. Nous avons encore beaucoup de chemin à parcourir, mais nous avons hâtes de voir ce qui nous attend.