Fred Pinel, le malletier fabricant d’émotions

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Plus qu’un metier, Malletier est un sacerdoce laissé entre les mains d’une poignée de maisons de luxe qui gardent secrètement leur savoir-faire dans de discrets ateliers jonchant notre douce France. Passant de maitre artisan à maitre artisan, l’oeuvre est grandiose, riche et polissée mais outre son héritage, la corporation transmet aussi son fardeau de codes figés et traditions difficiles à épouser. Pourtant un homme, Fred Pinel, a décidé d’ajouter son ecôt en 1998 bien qu’aucune nouvelle entreprise ne fusse crée depuis 150 ans. Pinel et Pinel, plus jeune malletier sur la place de Paris est venu dégraisser le mammouth, l’embellir et le moderniser au moment où la profession en avait le plus besoin.

« Pinel et Pinel, plus jeune malletier sur la place de Paris est venu dégraisser le mammouth »

Nous nous étions croisés dans les coulisses de l’exposition avec l’artiste Hom, mais il était pressé par le temps à cause d’un montage en retard, on m’avait alors promis une visite de ses locaux et quelle fût ma surprise lorsque quelques jours plus tard une proposition ferme de date me fut faite.

Loin de me traiter à la légère, le fondateur m’a accordé plus de 2 heures d’entretien au siège de l’entreprise qui fait aussi office de manufacture au coeur du 20eme arrondissement, alternant entre visite guidee, anecdotes croustillantes et punchlines sur les origines de l’entreprise.

Il est de ces rencontres qui vous changent la perception de votre prochain, celle avec Fred Pinel en est le parfait exemple, il est tout le contraire de ce que l’on pouvait imaginer d’un patron d’une maison de luxe et bizarrement ce n’est qu’un juste retour des choses tant son entreprise détonne au milieu de noms tels que Goyard, Moynat, Bernard et Louis Vuitton.

L’homme a grandi à Gagny, fait des etudes brillantes de commerce a Londres, y monte sa boite de pub et s’ennuie tellement qu’il décide de tout plaquer sans idée précise de la suite de son aventure. Tout ce qu’il sait est une envie irrépressible de changement. Apres s’être aventuré de gauche a droite, il finit par faire une fixation sur une valise trouvée dans le grenier de ses grands parents.

« Si tu n’es personne on te traite comme moins que rien »

Néanmoins, il se lance dans la maroquinerie qu’il n’hésite pas a presenter aux Grands magasins qui se moquent de l’habillage camouflage de sa collection. D’abord vexé, il finira frustré puis remonté comme un coucou lorsque quelques mois plus tard, on criera au genie de Dior pour sa collection cuir et camouflage. Depuis ce jour « Si tu n’es personne on te traite comme moins que rien » sera son leitmotiv. Il lui faut un nom, une maison, rentrer dans le sérail, faire partie du gotha du luxe mais avec des fonds limités, il faudra faire preuve d’ingéniosité. Il distingue alors une ouverture dans un nuage de fumée, un fumeur de cigare dépense entre 1200 et 5000 par mois pour sa consommation, on a donc affaire à une clientele fortunée qui dépense sans compter pour son petit plaisir, les étuis à  disposition sont d’un monotone et manque de fantaisie avec leur camaïeu oscillant entre noir et marron. Fred propose alors plus d’une centaine de coloris dans les peausseries les plus précieux pour des tarifs relativement faible dans la maroquinerie de luxe, après tout, il ne s’agit que d’accessoires. Un détaillant, lui montre la voie de Colette chez qui il bâtira sa renommée pendant plus de 2 ans, rentrera dans les plus belles adresses en développant sa gamme et économisera pour ses projets a venir, car le monsieur garde ses malles dans un coin de la tete et dessine des croquis dès qu’il en a le temps.

L’histoire s’emballe lorsque le celebre Joseph de Londres frappe a la porte de son atelier pour commander des accessoires, voit les croquis, puis lors de la livraison lui commande ses 3 premieres malles dont la malle Bureau, de là allaient découler nombres de collaborations avec les noms les plus prestigieux Hom, Brompton, Lacroix, Krug, Bang & Olufsen et j’en passe. Les malles intelligentes étaient nées car Comme Fred aime à le rappeler, il ne fait pas partie du sérail et n’est donc pas tenue par les codes de la corporation, il peut mettre de la couleur dans ses creations, un imac, une arcade crachant le dernier son de Kanye West ou encore un bonsaï pour élever son âme, les possibilités sont multiples tant qu’il fabrique de l’émotion.

Depuis 1998 mais les malles ont commencé en 2004?

J’ai toujours voulu faire des malles, cela était mon objectif des la creation de ma boite mais je n’avais ni les fonds, ni le la renommée nécessaire, j’ai donc travaillé sur un autre produit avec les malles en ligne mire. En continuant de developper mes maquettes. Dès que l’opportunité s’est présentée, j’ai foncé!

Pourquoi des malles?

Je ne peux pas l’expliquer, j’ai bloqué sur celle de mes grands parents, l’ai reproduite et la conserve jalousement. J’ai eu cet attrait pour le cuir qui m’a littéralement hypnotisé.

Tu es autodidacte?

Dans ce domaine, totalement. Je n’ai pas eu de formation classique ce qui me permet de faire fi des conventions du milieu. J’ ai la chance de ne pas être mauvais en travaux manuel. J’ai appris en démontant puis remontant celle de mes grands-parents. Heureux hasard,le premier artisan de France spécialiste des mallettes d’agents secrets partage mes locaux à ce moment. Je lui montre mon oeuvre et il ne trouve presque rien à dire. Il me montre les ficelles du métier

Pourquoi une palette aussi large de couleurs?

La couleur a fait notre renommée, c’est notre identité, qu’il s’agisse de petits accessoires ou de nos malles 100 % personnalisables. Néanmoins, parfois, il vaut mieux ne pas donner trop de choix au clients pour ne pas finir avec un produit hideux. Il faut accompagner le client, mon expérience de directeur artistique en pub m’aide en cela.

Pourquoi ce nom?

C’est parti d’une boutade puis le mon nom auquel on accole mon plus fidèle soutien, ma femme, s’est imposé comme une évidence.

Tes malles ne servent plus à voyager?

Non, pas les miennes. Ce sont des objets de décorations, des objets de plaisir, c’est d’ailleurs pour cela que je les livre personnellement des que j’en ai l’occasion pour voir le lien que les heureux propriétaires ont avec l’objet. Ca n’a pas de prix. A ce jour je n’ai eu qu’une seule mauvaise expérience de livraison, les ados avaient alors réceptionné les malles à la place de leurs parents et les avaient parquées dans un coin de la maison. =si l’installation ne prenait pas autant de temps, j’aurais tout remballé!

Tu fais toujours les accessoires?

Oui toujours c’est ce qui nous a permis de commencer et même aujourd’hui même si ce n’est plus la le gros du business, il n’y a pas de petits profits. J’ai noué de contacts hors du communs grâce aux étuis à briquets, ils m’ont ouvert les portes de mes meilleurs clients et surtout ils me rappellent d’ou l’on vient.

infinies.

« Fait tout pour ne pas t’aider »

Vit d’une Passion et on est marchand d’émotion

tout dépend du prix de votre bras